La méditation de pleine conscience pour prendre soin de sa santé.

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La pleine conscience dans le déclin cognitif léger (MCI) des personnes âgées

La pratique de la méditation pleine conscience pourrait réduire les niveaux d’anxiété et ralentir le déclin cognitif chez les patients présentant une déficience cognitive légère (MCI), suggèrent de nouvelles études.
Les études, présentées lors du récent congrès « Alzheimer Association International Conférence (AAIC) 2017 », sont des données préliminaires mais encourageantes, ont indiqué les chercheurs.
Dans une étude randomisée de Singapour, les patients atteints de déficience cognitive légère (MCI), qui ont suivi une formation à la méditation de pleine conscience, ont montré des améliorations des tests cognitifs et des réductions de la protéine C-réactive (CRP), biomarqueur inflammatoire, comparativement aux patients qui avaient suivi un programme d’éducation thérapeutique.
« Nous avons montré que cette intervention de pleine conscience, peu coûteuse et autonomisante pour le patient, permettait une amélioration des fonctions cognitives et des biomarqueurs infllamtoires chez les personnes âgées avec MCI », a déclaré Kheng Siang Ted Ng, de l’Université Nationale de Singapour, qui a présenté l’étude.
Il a suggéré que l’abaissement des niveaux de CRP (biomarqueur d’inflammation) indiquait que la pleine conscience pourrait ralentir une composante neuro-inflammatoire de la démence, dans la mesure où la CRP module la vascularisation et cause une hypoperfusion du cerveau, entraînant une augmentation des lésions de la substance blanche cérébrale et des infarctus cérébraux silencieux.

David Morgan, professeur de pharmacologie moléculaire et de physiologie à l’Université de South Florida, à Tampa, président de la session où l’étude a été présentée, a déclaré: « Je ne dirais pas que les résultats montrent un succès accablant, mais il y a une indication qu’il peut y avoir des avantages. Il n’est pas clair si ceux-ci sont dus à des activités de plein air associées au programme ou aux aspects de  socialisation – les patients reçoivent une attention particulière – mais quelque soit l’explication, c’est une bonne nouvelle. »
Le Dr Morgan, coprésident du comité du programme scientifique de l’AAIC, a ajouté: «Nous avons donné à cette étude une présentation orale pour sensibiliser aux approches non pharmacologiques. Nous voulons encourager ces types d’activités, d’autant qu’elles sont peu coûteuses. »
Dans une autre étude, présentée sous forme de poster, les patients atteints de MCI qui ont bénéficié d’une formation à la pleine conscience ont récupéré plus rapidement après avoir commis une erreur dans un test de concentration, qu’un groupe de contrôle qui a reçu des séances d’éducation. «Nous avons constaté que les patients présentant une déficience cognitive légère pouvaient pratiquer la pleine conscience et qu’il y avait un effet bénéfique sur leur capacité à rester concentré lorsqu’ils s’engagent dans un test d’attention», chercheur principal, Eddy Larouche, BSc, Université Laval, Québec.
« Nous croyons que la pleine conscience peut aider en réduisant la réactivité et l’auto-jugement », a-t-il ajouté. « On sait que la pleine conscience peut contribuer à contrôler les émotions – il a été démontré son efficacité pour réduire l’anxiété et la dépression – et dans cette étude, elle semble aider les patients à garder leur calme et à continuer la tâche ».
Alors que cette étude n’a montré aucun effet sur la mémoire ou la démence, Larouche a mentionné que le stress a un effet important sur la mémoire et sur la progression de la détérioration cognitive. «Être capable de continuer à accomplir des tâches nécessitant une concentration, est un avantage important lorsque les patients souffrent d’une déficience cognitive légère et que le bénéfice peut se traduire par une progression retardée du déclin cognitif», at-il déclaré. « Nous aimerions faire une étude plus large pour voir si c’est le cas ».

« Il n’y a pas beaucoup d’études publiées sur la pleine conscience chez des patients présentant une déficience cognitive légère. Il est encourageant que nous ayons vu des bénéfices dans cette population », at-il ajouté.
Étude randomisée

Présentant l’étude de Singapour, Ng a expliqué que certaines études ont suggéré un bénéfice de la « mindfulness » dans le MCI, mais celles-ci étaient des études transversales. Ainsi, il est difficile de prouver une relation causale.
Son groupe a donc mené une étude randomisée dans laquelle 55 patients atteints de MCI vivant à domicile à Singapour ont été assignés au hasard à un programme de formation à la pleine conscience ou à l’éducation à la santé.
Les séances pour les deux groupes ont été organisées chaque semaine pour les 3 premiers mois et mensuellement pour les 6 mois suivants. Les patients ont subi des examens sanguins et salivaires pour mesurer divers niveaux de cytokines et de biomarqueurs, et ils ont également subi des tests neurocognitifs.

Les résultats ont montré que ceux qui ont reçu une formation à la mindfulness ont considérablement diminué les niveaux de CRP lors des 9 mois, et ont également montré une amélioration significative de l’attention et de leur mémoire de travail à la fois à 3 mois (β = 1,29; P = 0,01) et à 9 mois (β = 2,02; P <0,001).
Les patients recevant une formation à la pleine conscience ont également connu une amélioration significative de la mémoire à long terme à 3 mois (β = 1,41; P = 0,04). Les autres domaines cognitifs, l’axe hypothalamo-hypophyso-adrénergique et les taux de cytokines, n’ont eu aucun changement significatif.
Rester sur la tâche

Dans une autre étude, Larouche et ses collègues ont assigné au hasard 41 patients avec MCI à des cours d’entrainement à la pleine conscience ou d’éducation thérapeutique. Les deux groupes ont reçu des séances de 2,5 heures une fois par semaine pendant 8 semaines
Ceux-ci incluaient l’attention sur les différentes parties du corps, sur des tâches spécifiques (telles que la respiration) et un «yoga doux» (mouvements lents). Les patients ont également été invités à pratiquer les exercices pendant une demi-heure tous les jours à domicile.
Le groupe « éducation thérapeutique » a reçu des informations sur le vieillissement et la façon de gérer la vie avec des déficiences de la mémoire.
Pour l’analyse statistique, le groupe de pleine conscience a été divisé en deux selon la quantité de formation réelle qu’ils ont réellement réalisée. Le groupe à dose élevée a atteint une moyenne de 1277 minutes au cours de la période de 8 semaines et le groupe à dose inférieure a atteint en moyenne 700 minutes.
Les patients ont subi différents tests cognitifs et le « questionnaire de mindfulness à cinq facettes » avant et après l’intervention et 3 mois plus tard.
Les résultats ont montré que le groupe de mindfulness avait des améliorations quant à la capacité de continuer à rester concentré sur une tâche au « Sustained Attention to Response Task (go/no-go tank) », un test d’attention soutenue. Plus précisément, les patients ont affiché un ralentissement plus faible (combien de temps il faut pour revenir à la performance normale après avoir commis une erreur) dans le test impliquant la pression d’un bouton en réponse à certains chiffres affichés sur l’écran. Deux attitudes à partir du questionnaire de pleine conscience ont prédit un ralentissement inférieur: la diminution de la réactivité et de l’auto-jugement.
« La tâche va assez rapidement et il est fréquent de faire des erreurs, mais nous avons constaté que les patients qui ont pratiqué la pleine conscience ont pu revenir à la tâche plus rapidement après avoir commis une erreur », a expliqué Larouche. « C’est une mesure très sensible de la capacité à se reconcentrer après avoir commis une erreur et  combien une personne est submergée par l’erreur ».
Il a souligné que les patients atteints de MCI s’inquiètent souvent et présentent un degré élevé d’anxiété quant à leur perte de mémoire et aux effets sur la vie quotidienne. « Dans notre étude, ceux qui pratiquaient la pleine conscience au niveau supérieur avaient moins de ralentissement  en comparaison du groupe « éducation thérapeutique » », a-t-il déclaré.
« Ce n’était qu’une différence de 30 microsecondes, mais elle est restée significative après avoir contrôlé d’autres facteurs », a-t-il ajouté. « Ce n’est pas un gros effet, mais il ouvre un chemin pour une étude future ».

Source: Medscape Neurology news

Grégory Baptista

Médecin spécialisé en médecine interne et gériatrie, également psychothérapeute, et instructeur de programmes MBSR et MBCT, fondateur et coordonnateur du Centre de Mindfulness de Montpellier, enseignant au Diplôme Universitaire « Méditation & Santé » de la Faculté de Médecine de Montpellier-Nîmes.